11/06/2024

Il y a 50 ans le lynx était de retour !

En 1974, un Lynx mâle est abattu à Thoiry, sur le territoire de la future Réserve naturelle. Cela signe le retour de l’espèce sur le territoire.

Jusqu’en 1980, les observations sont rares, néanmoins deux noyaux se constituent dans le Jura français : dans la Haute Chaîne de l’Ain et dans le Doubs.

Entre 1984 et 1988, la croissance démographique s’accélère et en 1989 ces deux noyaux se rejoignent. À partir de là, l’espèce colonise les Alpes françaises.

De 1993 à 1998, le suivi télémétrique de Lynx équipés par le Groupe Lynx suisse, permet de mieux connaître certains paramètres démographiques. Une femelle adulte équipée, Elsa (F24), était installée dans la Réserve naturelle. Entre Suisse et France, son territoire couvrait 140 à 180 km2.

Entre 1993 et 1996, dans la même tanière, elle a donné naissance à 6 femelles et 1 mâle. Tous les jeunes ont été marqués. Le collier d’Elsa a cessé d’émettre le 22 septembre 1996 pour une raison inconnue. Un mâle adulte, Taro (M10) possèdait un territoire beaucoup plus vaste qui s’étendait alors du Fort l’Écluse au Marchairuz (Suisse) sur près de 400 à 500 km2. Son territoire couvrait celui d’Elsa et d’Aïda (F18), femelle adulte dont le territoire suisse jouxtait celui d’Elsa au nord, avec lesquelles il se reproduisait. En 1997, Aïda a été retrouvée morte suite à une infection.

Des subadultes peuvent errer dans la Réserve naturelle à la recherche de territoires libres, comme cela a été le cas de Lucas (M14), fils de Taro et d’Aïda qui se cantonna dans la Réserve naturelle en 1996 ; son émetteur cessa de fonctionner à partir du 22 septembre 1996.

Durant le suivi télémétrique, les scientifiques suisses ont relevé de nombreuses proies. Dans le Jura, le régime alimentaire se composait alors de :

  • 77% de Chevreuil (Capreolus capreolus),
  • 15% de Chamois (Rupicapra rupicapra),
  • 5,4% de Renard (Vulpes vulpes),
  • 1,6% de Lièvre d’Europe (Lepus europaeus) ainsi qu’un chat forestier (Felis sylvestris).

Le taux de reproduction est estimé dans le Jura à 1,2 jeunes par femelle et par an. Ce faible taux s’explique par une mortalité de plus de 50% des jeunes entre la naissance et la fin de la première année.

Le lynx est donc une espèce sédentarisée sur la Réserve naturelle depuis de nombreuses années.

De par son statut national, sa valeur patrimoniale et surtout la responsabilité de la Réserve naturelle envers sa protection, cette espèce a été définie comme un enjeu de la Réserve naturelle. En effet, cette dernière joue un rôle fondamental quant à sa conservation en France : elle est située au cœur de l’arc jurassien qui constitue le noyau de population principal de l’espèce, elle joue le rôle de corridor écologique principal vers le nord du massif mais aussi vers les Alpes, elle assure un rôle de connexion entre les populations suisses et françaises, elle offre des habitats optimaux (préservés et protégés) et une forte disponibilité en proies.

En 2012, un premier suivi par pièges photographiques du Lynx boréal a été mis en place à l’échelle du massif Jurassien (ONCFS-CNERA et FDC Jura). À cette époque, la Réserve naturelle ne faisait que participer à ce suivi et seule la partie nord de la Réserve naturelle était concernée.

À partir de 2015, la Réserve naturelle a pris l’initiative, en partenariat avec l’ONCFS-CNERA, de mettre en place ce suivi sur l’ensemble de son territoire. L’objectif affiché étant de mieux connaître les déplacements, la reproduction et les habitudes des individus fréquentant la Réserve naturelle. Ce suivi (organisé tous les 2 ans) sera poursuivi au cours de ce plan de gestion. Par ailleurs d’autres suivis scientifiques et actions de protection mais aussi de communication/sensibilisation seront mis en place dans les dix prochaines années. Une grande partie de ces suivis et/ou actions s’appuieront d’ailleurs fortement sur le futur Plan National d’Actions (PNA) en faveur du Lynx (porté par l’État depuis 2018) dans lequel la Réserve naturelle est déjà fortement impliquée (partenaire technique dans la rédaction).

Les menaces pesant sur le Lynx sont liés principalement à la restriction d’un domaine vital de qualité.

Ce sont surtout les aménagements touristiques et routiers qui fragmentent son habitat et qui sont, de ce fait, néfastes au maintien de la population. Le risque de collisions avec les véhicules est un autre facteur important à prendre en considération et sur lequel des moyens devront être mis pour limiter son effet.

Enfin, une vigilance doit être portée sur les actes de braconnage ou de destruction illégale.

À ce jour, même s’il est très difficile de définir le nombre et le degré d’influence de ces actes sur les effectifs de Lynx boréal à l’échelle du massif, ils demeurent un facteur de pression réel qui peut être fort dommageable à l’espèce. Rappelons qu’il y a eu plusieurs actes de braconnage avérés sur le massif jurassien dont certains sur la Haute Chaîne (1 en 1974, 2 en 1980 et 1 en 1994).

La Réserve naturelle nationale de la Haute Chaîne du Jura, très impliquée pour la sauvegarde de cette espèce emblématique de la Haute Chaîne du Jura, représente Réserves naturelles de France aux comités de pilotage national du PNA Lynx.

Pour en connaitre d’avantage sur les actions menées par le PNA Lynx, cliquez ICI